Après Maastricht : quelles politiques économiques en Europe ?
Le Traité de Maastricht pose avec acuité le problème de l'organisation de la politique économique en Europe, tant en ce qui concerne la phase de transition, qu'en ce qui concerne le fonctionnement d'une zone à monnaie unique. Sur le fond, deux points de vue s'opposent : pour les uns, la construction de l'Europe doit permettre la renaissance d'une politique économique active tournée vers la croissance. Pour les autres, au contraire, l'Europe doit être libérale. Les accords de Maastricht optent très clairement pour une politique économique « vertueuse », notamment en adoptant des critères rigoureux de dettes et de déficits publics et en mettant en place une Banque centrale indépendante. Les accords prévoient une phase transitoire durant laquelle la politique économique des différents pays sera dictée par la nécessité de satisfaire aux conditions qui permettront d'accéder à l'UEM. Cette phase intervient dans une période où les perspectives de croissance sont déjà médiocres. Actuellement, 10 pays sur 12 ne satisfont pas ces conditions et devraient pratiquer une politique économique plus restrictive. Ceci est difficilement justifiable pour certains pays qui, malgré une dette publique importante, ont un solde extérieur excédentaire. Ces critères imposent de plus une politique économique pro-су clique. L 'ajustement budgétaire requis par une application stricte des critères est extrêmement fort pour certains pays : 7, 5 points de PIB en Italie, 7 points en Belgique et en Grèce, 2,5 points en Irlande. Une simulation, réalisée à l'aide du modèle MIMOSA, montre que, si les pays concernés mettaient en œuvre une politique représentant la moitié de ce qui ~ést nécessaire, le taux décroissance du PIB de la CE serait plus bas de 0,3 % environ chacune des trois premières années et son niveau resterait inférieur de 1,4% à son niveau du compte central en 1999. Pour les pays concernés, cette politique aurait un effet récessif important ; l'objectif d'une dette publique à 60% du PIB en 1999 reste hors d'atteinte. La manière dont est organisée la convergence laisse mal augurer de l'organisation de la politique économique dans l'Union européenne. Le Traité prévoit une Banque centrale européenne (ВСЕ) indépendante, chargée avant tout de la stabilité des prix. La France ne retrouvera pas une influence sur sa politique monétaire mais l'abandonnera à des partisans de politiques rigoureuses. Les pays n'auront plus à leur disposition les armes du taux d'intérêt et du taux de change, mais n'auront plus à se soucier directement de leur solde extérieur, ni à craindre les anticipations défavorables des spéculateurs. Il y a là un degré de liberté utile mais aussi un risque potentiel que chaque pays pratique une politique trop expansionniste. En réaction, le Traité impose des limites contraignantes à la dette et au déficit publics, sans tenir assez compte des considérations conjoncturelles ou structurelles, qui peuvent rendre nécessaire que ces barrières soientfranchies, temporairement ou durablement. L 'accord de Maastricht peut contribuer à terme à impulser la croissance en Europe, mais, dans son état actuel, il ne prévoit pas une coordination satisfaisante de la politique économique en Europe entre la ВСЕ responsable de la politique monétaire et les treize détenteurs de pouvoir budgétaire. De nouveaux accords, instituant la coordination de l'ensemble des instruments de politiques économiques, sont donc nécessaires. On ne pourra faire l'économie d'un débat de fond sur l'organisation et les objectifs de /apolitique économique en Europe.
Year of publication: |
1993-01
|
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Authors: | Delessy, Henri ; Lerais, Frédéric ; Paris-Horvitz, Sébastien ; Sterdyniak, Henri |
Institutions: | Sciences économiques, Sciences Po |
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